Cette exposition est en quelque sorte la continuité de “Fabrique(s) du lieu” en 2007 dans les mêmes lieux ; les “Tanneries” immense lieu avec des murs percés, traversés par la lumière, où tout est à construire. A l’opposé: la galerie “1’AGart”, lieu plus traditionnel, dans un espace clos, prêt à recevoir des œuvres déjà réalisées dans les ateliers des artistes. J’ai choisi quatre artistes qui s’inscrivent dans cette double problématique “avec le mur et sans le mur” à travers la transparence. Les deux peintres, Laura Lisbon et Bernard Moninot travaillent ce dédoublement du “tableau”, d’une part dans le “process” lui-même ; la remise en cause du support, donc du “lieu” dans l’œuvre, mais en gardant l’inscription première du tableau qui traverse l’histoire depuis le XIIIéme siècle et. d’autre part une dé-construction où les éléments internes se déplacent dans l’espace pour re-construire un plan. Les deux sculpteurs Toni Grand et Vincent Péraro travaillent l’aspect “pictural” de la surface du volume qui détermine la forme: “la peau” devient objet, le volume n’est pris en considération que dans un deuxième temps : ainsi, quand on regarde l’oeuvre achevée, elle conserve cette duplicité selon qu’on la regarde de près ou de loin. Ce “non-effet” est le même pour les quatre artistes, aucune illusion optique, le cheminement opère dans la vraisemblance, l’œuvre se construit de l’intérieur ainsi que la question de l’espace qui n’existe pas.
Le bâtiment dans lequel l’exposition a lieu -l’ancienne tannerie, en bordure de la ville d’Amilly atteste, par sa configuration même, du “paradoxe du mur et du diaphane”, titre de l’exposition qui réunit les oeuvres exposées dans ce lieu. Construit en 1947 et abandonné au début des années 1970, le bâtiment principal de cet ancien site industriel est caractérisé par son immense surface au sol (60x25m) et son espace intérieur très volumineux, (les plafonds font presque 10 mètres de haut). Le bâtiment a une présence massive, une matérialité imposante, un aspect fonctionnaliste brut, et s’insère d’autant plus sévèrement et de manière contrastée dans l’environnement champêtre qui l’entoure : des champs, une rivière et des maisons de campagne. Dans cette mesure, il est difficile de savoir comment faire la différence entre la taille du bâtiment et son échelle. Maintenant que toutes les machines et équipements ont été enlevés, le bâtiment a une dimensionnalité évidée, à laquelle font écho les deux rangées de bassins vides qui courent à travers un côté du bâtiment entre les deux rangées de colonnes intérieures, un espacement rythmique et symétrique de bassins en béton, vides, dans lesquels les dépouilles et les peaux étaient autrefois lavées et dont les parois sont absorbées par l’obscurité ambiante, au-dessous du sol sur lequel le visiteur marche à présent.
Il y a une grande variété dans les matériaux qui constituent le sol lui-même, un mélange inégal de différentes surfaces de ciment, de sable et de briques, qui renforcent la présence matérielle et texturelle des surfaces qui dominent partout. Les murs eux-mêmes -à certains endroits assez sérieusement fissurés, effrités, et émiettés de façon marquante, sont ponctués par des brèches sur les quatre côtés et par la rangée horizontale des ouvertures supérieures ; mais les partitions, divisions, et séparations dans les murs n’existent pas pour créer ou engendrer un espace pour les colonnes (les origines de l’architecture comme le suggère Louis Kahn) ; car les espaces dans les parties inférieures des murs ont aussi un usage fonctionnel, celui de faciliter la manipulation de grandes quantités de dépouilles et de peaux à l’intérieur et à l’extérieur du bâtiment ; ils sont aussi assez ouverts pour laisser entrer la lumière qui non seulement traverse l’obscurité de l’espace intérieur, mais renforce d’autant plus le développement de la surface latérale des murs qui délimitent l’espace des Tanneries. Etant donné que les espaces des fenêtres entourant le bâtiment sont plus hautes que le spectateur, il n’est pas possible pour celui-ci d’avoir une vue traversante, de l’extérieur vers l’intérieur ; l’œil est donc toujours ramené à la présence matérielle des murs qui forment le cadre.
Les rangées intérieures de colonnes qui étirent la longueur du bâtiment soulignent aussi leur autonomie visuelle, si ce n’est structurelle, vis-à-vis des murs ; en même temps, la matérialité du ciment et de la maçonnerie friable et dégradée caractérise à la fois les murs extérieurs et les colonnes intérieures. Les traces des formes en bois qui servaient de coffrages, à l’intérieur desquels le ciment était coulé, sont aussi toujours visibles, comme des vestiges de la construction d’origine. Il n’y a donc rien là de décoratif, pas de détails supplémentaires qui détournent ou embellissent les murs, colonnes et maçonnerie, comme si les murs restaient exposés, dans l’attente d’une exposition à venir. (En ce sens, les murs du bâtiment constituent les éléments virtuels qui servent de cadre et de délimitation, et rappellent la longue tradition de la peinture, qui va des grottes de Lascaux et Chauvet aux fresques, des formes structurelles et architecturales utilisées dans les compositions picturales, jusqu’à ce “mur de peinture” dont parle Balzac dans Le Chef d’œuvre inconnu. On pourrait arguer que si aucune des œuvres de l’exposition actuelle dans les tanneries n’est accrochée sur ses murs, ou peinte sur les murs, ce n’est pas parce qu’elle tourne le dos à cette tradition mais parce qu’elle cherche à la repenser et à réarticuler les véritables termes de cette tradition.)
En même temps, le jeu insistant, et rythmique, entre les murs intérieurs et les colonnes de ciment, efface toute connotation religieuse ou un symbolisme qui pourraient être associés à la structure d’une église, d’une basilique ou d’un temple ; même si le bâtiment préserve le sens de l’espace processionnel, ouvert (comme le suggèrent les entretiens avec les artistes intégrés dans ce catalogue) à un mouvement temporel ou à une spatialisation, que le spectateur ressent quand il traverse l’espace et qu’il marche le long des colonnes, ou entre elles, et que les murs alentour et les autres œuvres exposées lui apparaissent, puis disparaissent de sa vue, un modèle de continuité et de discontinuité qui étend à la fois la longueur et la largeur du bâtiment.
S’il y a un paradoxe qui hante cette description initiale du site, cela vient de la juxtaposition simultanée entre les murs (ces murs, pour ainsi dire, qui deviennent un emblème de la tannerie elle-même) et les éléments diaphanes ou translucides qui concourent au déplacement des murs, de leur présence matérielle et imposante. Nous avons déjà rappelé l’altération et le délabrement qui marquent la plupart des surfaces murales de ce bâtiment, leur conférant une dimension temporelle et transformative qui reste inégale et irrégulière dans ses effets. Exposé sur les quatre côtés aux éléments naturels, traversé par des rayons de lumière qui sont filtrés et réfractés par les arbres environnants et les reflets de l’eau depuis la rivière toute proche, le bâtiment lui-même est dans un processus de transformation continuelle, sujet aux changements des saisons, du temps, des transitions, déplacements et modulations de la lumière, de jour en jour, d’heure en heure et même de minute en minute (puisqu’il n’y a pas d’éclairage artificiel dans le bâtiment, il y a des moments où tout semble illuminé, d’autres moments, lorsque le crépuscule tombe, où tout ce qui est solide à l’intérieur commence à disparaître à la vue : on comprend ici que les questions relatives à la transparence ne peuvent être séparées de sa possible opacité sous-jacente). C’est dans ce contexte que nous pourrions aussi suggérer que la structure physique du bâtiment devient plus temporelle que spatiale, comme si ses traits structuraux étaient en permanence exposés à la logique transformative (une “dia-logie”) du “trans” et du “dia” en tant que tels (une temporalité aussi contingente que les expositions et les œuvres d’art qui vont et qui viennent ; une temporalité à laquelle les artistes se réfèrent incessamment dans leurs interviews lorsqu’ils parlent de leurs propres projets pour le bâtiment.) En effet, le désir de marquer ce site et cette exposition photographiquement -et les photographies de Camille Bonnefoi incluses dans ce catalogue l’attestent de manière assez belle-illustre encore mieux cette tension entre le spatial et le temporel, la structure et la transformation, la présence et le vestige, la permanence et la contingence, la surface et l’écran, la lumière et l’ombre. Ce n’est pas un bâtiment ou une exposition qui attendent d’être photographiés ou filmés, au sens où l’espace du bâtiment et les travaux exposés seraient déjà prêts à être photographiés et reproduits en tant que photographie ou projetés sur un écran. Car l’espace des Tanneries est toujours déjà photographique en soi -c’est un bâtiment qui existe (comme la Villa Noailles filmée par Man Ray) dans le monde du diaphane, et ainsi en va-t-il de l’univers de la photographie et du film, comme de la singularité des œuvres exposées qui s’offrent à la fois à ce monde -c’est leur don -tout en refusant et en résistant à leur saisie et à leur capture photographique.
Ce paradoxe entre le mur et le diaphane est parfaitement saisi dans la propre représentation du site des Tanneries réalisée par la ville d’Amilly sur son site internet. Caractérisé par de larges espaces qui sont à la fois “architecturaux et naturels”, le site est désigné officiellement à la fois comme une “zone industrielle” et une “zone environnementale”, ou encore par son « patrimoine industriel et naturel ». D’un côté, si les bâtiments abandonnés de cette zone industrielle sont entourés par des pelouses, des arbres et des rivières, la présence des surfaces murales et la hauteur des plafonds dans “cet édifice vaste et très lumineux” rappellent en même temps “la présence de machines industrielles imposantes” qui occupaient autrefois le bâtiment, une machinerie autrefois accueillie par “une structure de béton porteuse, solide et très épurée”. D’un autre côté, et assez paradoxalement, l’éloignement par rapport à la ville elle-même offre “un lieu méditatif et autonome”. En effet, vu la façon dont la Tannerie est continuellement encadrée sur deux côtés par les affluents du Loing, le terrain sur lequel se tient le bâtiment semble parfois flotter, comme une île. Officiellement classé ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique), le site est donc aujourd’hui caractérisé par la combinaison apparemment disjonctive entre son intérêt naturel et sa matérialité architecturale, aussi bien que par “la constitution d’un historique”.
Si les caractérisations et les descriptions du site suggèrent un équilibre délicatement soutenu entre nature, architecture et histoire, dans lequel le paradoxe entre le “mur” et le “diaphane” est pris dans une tension productive et créative, elles représentent aussi une rupture dialectique avec le passé industriel du bâtiment, au sens où cette dialectique nous ouvre aussi au futur des Tanneries en tant que site culturel et lieu de rencontres artistiques : “au cœur de ce projet de transformation, la ville souhaite mettre en lumière et retenir toutes les mémoires du lieu et préserver l’identité du site. Le projet de création d’un espace d’art tient compte de l’histoire du site, de sa fonction, de son rôle, de sa nature, en rendant ces lieux à leurs propriétaires originels : les travailleurs de la matière que sont les artistes”.
Cette affirmation du futur des Tanneries témoigne de l’extraordinaire vision et de l’engagement peu commun de la ville d’Amilly dans sa programmation culturelle. Ce que nous voulons remarquer ici est la façon dont la série de paradoxes que nous avons commencé à explorer dans notre lecture des Tanneries, à la fois comme site naturel, industriel et historique, sont aussi sujets à leur récupération ou assimilation dialectique, dans laquelle c’est l’artiste qui vient à représenter et assumer -et même à incarner -cette dialectique. On pourrait même arguer que cette dialectique est celle de Marx (pour ne pas dire marxiste), celle qui cherche à assurer et réaliser la transition entre la production et la création, du travail sur la nature à la réalisation de soi par la création (l’interview de Vincent Péraro dans ce catalogue va aussi dans ce sens). En d’autres termes, les paradoxes qui pouvaient sembler caractériser le site de la Tannerie sont maintenant à la fois affirmés et effacés ou dissimulés, potentiellement réduits à la préservation et à la célébration d’une “identité” du site, car le futur du site est déjà inscrit dans ses origines. Ou plutôt, les paradoxes sont seulement effacés et dissimulés si on affirme que le travail (“work”) devient « l’œuvre » (“the work”), ou que le travail (“labor”) est intrinsèquement artistique et créatif, que le travailleur est toujours un artiste et que “travail” et “œuvre” sont indissolublement liés. Si nous nous positionnons nous-mêmes au véritable cœur des tensions et conflits décisifs autant que divisant qui informent notre histoire et notre contemporanéité -et encore une fois, c’est un défi que la ville d’Amilly a la volonté d’assumer d’une manière sans précédent-le dépassement (la relève dialectique) de ces paradoxes est, comme la description des Tanneries sur le site internet de la ville le suggère, essentiellement téléologique -l’art comme mouvement (pour citer Marx : l’art en tant que “le mouvement immortel de son propre temps”) ; le site des Tanneries lui-même n’aura trouvé sa justification originelle -son futur antérieur -qu’à se définir comme un site de rencontres artistiques.
Et cependant, la référence au diaphane dans le titre de l’exposition ouvre peut-être de nouvelles voies pour repenser cette question du paradoxe, ou d’autres manières de questionner, de refuser même son assimilation dialectique, sa représentation, son appropriation et son identification. Ce n’est sûrement pas une coïncidence si la plupart des textes les plus importants écrits sur la phrase d’Aristote -le “est ti diaphanes” -exploré d’abord dans De Anima (De l’Âme) tournent autour de la question même du paradoxe. Ainsi, pour citer des exemples récents dans les publications, l’Eloge du diaphane, méticuleusement argumenté par Georges Didi-Huberman (réédité dans Phasmes) tourne autour du jeu “paradoxal “ ou “aporétique” de l’apparition (“épiphasis”) et de la disparition (“aphanisis”) que l’oeuvre présente de manière simultanée, un mouvement de différentes temporalités dans l’œuvre qui n’offre pas seulement une résistance à la vision (tel l’obstacle d’un mur, comme il le remarque) mais l’ouvre à une problématique de l’articulation avec sa véritable place ou milieu -son lieu comme milieu -une problématique qui, comme l’évocation par Aristote du diaphane l’attestait déjà, et comme la première lecture de Fra Angelico par Didi-Huberman l’avait aussi suggéré, n’aboutit toujours qu’à une “aporie phénoménologique”.
C’est cette aporie qui pourrait sembler être au cœur de la propre définition du diaphane par Aristote (elle est aussi une invention conceptuelle), qui affirme une invisibilité au cœur de toute visibilité, et qui cherche dans son argument originel à distinguer la force ou la potentialité de la couleur de son action. Le diaphane est une façon de nommer cette force ou potentialité de la couleur, mais seulement dans la mesure où une telle potentialité trouve son origine dans l’obscurité, tout comme la couleur est articulée par l’absence de couleur ou le son par le silence. Le diaphane vient aussi entre l’œil et l’objet ou la surface de l’objet -littéralement un mi-lieu dont l’identité est absente puisqu’il s’agit toujours de la traversée et du déplacement de ce lieu, à la fois délimité et délimitant. Le diaphane est le “in” du “in-between”, l’en de l’entre (pour citer le terme que Simon Hantaï emprunte à Philippe Lacoue-Labarthe). En somme, nous pourrions dire qu’il devient nécessaire dans l’affirmation du diaphane par Aristote de faire une distinction entre le rythme du “dia-logique” comme paradoxal (et donc sujet à sa résolution, à son dépassement dialectique) et une autre “logique” qui est aporétique, elle-même irréductible à un ordre dialectique, mais ouverte à l’espacement interrompu en permanence (une ex-position, pourrait-on dire) qui reste immanente au diaphane en tant que tel. C’est la tâche que Anca Vasiliu reprend dans son livre magnifique, Du diaphane. C’est la même tâche que Giorgio Agamben poursuit dans son essai On Potentiality, qui reprend la notion de diaphane du De Anima d’Aristote dans le but de faire une distinction entre sa fonction représentationnelle ou son mouvement dialectique, et une potentialité à ne pas voir, ou à ne pas entendre. Le diaphane devient une “impotentialité” dans laquelle un non-être ou une privation devient un refus d’agir, et c’est ce refus même qui est la condition pour penser en premier lieu une potentialité ou une puissance (potenza).
Grâce à l’immense générosité de la ville d’Amilly et à la ténacité extraordinaire de Sylvie Turpin dans ses fonctions et le don d’elle-même comme commissaire, je dirais que ce sont précisément les mêmes tâches et défis qui sont posés par les œuvres montrées dans cette exposition.
The building in which this exhibition takes place -the former Tannery on the edge of the town of Amilly -already attests to this paradox between the wall and the diaphanous that frames, as title, the work included in the exhibition. Constructed in 1947 and abandoned since the early seventies, the main building on this former industrial site is characterized by its immense floor plan (60m x 25m) and voluminous interior space (the ceilings are nearly 10m high). The building has a massive, almost overwhelming material presence, a brute functionalism and situatedness in its environment that is austere and assertive, and all the more so when compared to the surrounding fields, rivers, and buildings immediately adjacent to the site. In this sense, it is difficult to know how to distinguish the building’s size from a sense of its scale. Now that all the machinery and equipment has been removed, the building has a hollow dimensionality that is further echoed in the two rows of empty basins that run through one side of the building between the two rows of interior columns, a rhythmic, symmetrical spacing of hollowed out concrete basins in which the hides and skins were once washed and whose walls plunge downwards into darkness, submerged below the level of the floor on which the visitor now walks.
There are a variety of materials that constitute the floor itself, an uneven pastiche of different cement surfaces, sand, and brick, which reinforces the material presence and texturing of surfaces that dominate throughout. The walls themselves -in places quite markedly fissured, peeling, and crumbling -are punctuated by gaps on all four sides and by the horizontal row of upper window spaces, but the partitions, divisions, and separations in the walls do not exist here to create or engender a space for the columns (the origins of architecture as Louis Kahn will once supported by “a cement-bearing structure that is solid and uncluttered.” On the other hand, and quite paradoxically, the isolation from the town itself offers “a place for meditation and seclusion.” Indeed, given the ways in which the Tannery is continually enframed on two sides by tributaries of the Loing River, the terrain on which the building stands sometimes appears to float, like an island. Officially classified as a ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique or Natural Zone of Ecological, Faunal, and Floral Interest), the site today is thus characterized by the seemingly disjunctive combination of its natural interest, architectural materiality, as well as the way it “constitutes itself historically.”
If these characterizations and descriptions of the site suggest a delicately sustained equilibrium between nature, architecture, and history, one in which the paradox between the “wall” and the “diaphanous” is held in productive and creative tension, they also represent a dialectical rupture with the building’s industrial past, in the sense that this dialectic also opens us to the Tannery’s future as a cultural site and place of artistic encounter: “At the heart of this project of transformation, the town wishes to bring to light and retain all the memories of the site and preserve its identity. The project to create an artistic space takes into account the site’s history, its function, its role, and its nature, returning the site to its original owners: those whose work with materials makes them artists [les travailleurs de la matière que sont les artistes].”
This affirmation of the Tannery’s future testifies to the town of Amilly’s extraordinary vision and uncommon, perceptive engagement with its cultural programming. What we want to remark here is the way in which the series of paradoxes that we have begun to explore in our reading of the Tannery as both a natural, industrial, and historical site are also subject to their dialectical recuperation or assimilation, one in which it is the artist that comes to represent and assume -even embody -this dialectic. One might even argue that this dialectic is Marx’s (if not also a Marxist) dialectic, one that seeks to secure and realize the transition from production to creation, from work on nature to creative self-realization (Vincent Peraro’s interview in this catalogue also gestures toward this reading). In other words, the paradoxes that might have appeared to characterize the site of the Tannery are now both affirmed and simultaneously effaced and dissimulated, potentially reduced to the preservation and celebration of an “identity” for the site, for the future of this site is already inscribed in its origins. Or rather, the paradoxes are only effaced and dissimulated if one assumes that work becomes “the work,” or that labor is inherently artistic and creative, that the laborer is always an artist, and that work or “the work” is owned. If we find ourselves at the very heart of one of the decisive if also divisive tensions and conflicts shaping our historical and contemporary world -and again it is a challenge that the town of Amilly is willing to assume in unprecedented ways -the overcoming (the dialectical relève) of these paradoxes is, as the town’s own characterization of the Tannery on its website suggests, essentially teleological (art as “the immortal movement of its time” to cite Marx), and the site of the Tannery itself will have only ever found its original justification -its future anterior -as a site of artistic encounters.
And yet, reference to the diaphanous in the title of the exhibition perhaps opens other ways of rethinking this question of paradox, or other ways of questioning, even refusing its dialectical assimilation, representation, appropriation, and identification. It is surely no coincidence that many of the most important texts on Aristotle’s phrase -the esti ti diaphanes first explored in De anima -turn around this very question of paradox. Thus (to cite some recent examples in the literature) Georges Didi-Huberman’s meticulously argued “Éloge du diaphane” (reprinted in Phasmes) turns on the “paradoxical” or “aporetic” play of the work’s simultaneous appearance (épiphasis) and disappearance (aphanisis), a movement of different temporalities in the work that not only offer a resistance to vision (like the obstacle of a “wall” he remarks) but open the work to a problematic of articulating its very place or milieu -of lieu as milieu -a problematic that, as Aristotle’s turn to the diaphanous already attests, and as Didi-Huberman’s earlier reading of Fra Angelico had also suggested, only ever leads to a “phenomenological aporia.”
It is this aporia that would appear to lie at the heart of Aristotle’s own definition (which is also an conceptual invention) of the diaphanous, which posits an invisibility at the heart of all visibility, and which seeks in its original argument to distinguish the force or potentiality of color from its act. The diaphanous is a way of naming this force or potentiality of color, but only insofar as such a potentiality finds its origin in obscurity, just as color is articulated through the lack of color or sound through silence. The diaphanous also comes between the eye and the object or surface of the object -literally a mi-lieu whose identity is lacking since it is always the traversal and displacement of this place, at once delimited and delimiting. The diaphanous is the in of the in-between, the l’en de l’entre (to cite the term that Simon Hantaï borrows from Philippe Lacoue-Labarthe). In short, we might argue that it becomes necessary in Aristotle’s affirmation of the diaphanous to distinguish between the rhythm of its dia-logic as paradoxical (and so subject to its dialectical resolve) and another “logic” that is aporetic, itself irreducible to a dialectical ordering but open to the permanently interrupted spacing (an ex-posure we might say) that remains immanent to the diaphanous as such. This is task that Anca Vasiliu reposes in her magnificent book, Du diaphane. It is the same task that Giorgio Agamben takes up in his essay “On Potentiality,” which takes up the diaphanous in Aristotle’s De anima in order to distinguish between its representational function or dialectical movement and a potentiality not to see, or not to hear. The diaphanous becomes an “impotentiality” in which a non-being or privation becomes a refusal to act, and it is this very refusal that becomes a condition for thinking a potentiality or potency (potenza) in the first place. Thanks to the immense generosity of the town of Amilly and the extraordinary tenacity of Sylvie Turpin in her duties and gift as curator, I would suggest that these are precisely the same tasks and challenges that are also posed by the work included in this exhibition.